L’année 2024 n’est vraiment pas de tout repos pour les loueurs de meublés de tourisme. Et si elle devait surtout être l’année des Jeux olympiques, les évolutions fiscales apportées par le texte de la loi de finances 2024, ainsi que les interrogations autour de leur interprétation, sont venues troubler la fête. Et comme si cela ne suffisait pas, les discussions entourant l’adoption du projet de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue, ou PPL 1176, sont venues s’y ajouter.
Cette proposition de loi transpartisane, a été étudiée une première fois en janvier devant l’Assemblée nationale, puis une seconde fois fin mai devant le Sénat, avant finalement que la dissolution annoncée dans le courant du mois du juin ne laisse planer un vent de doute quant à son adoption et son contenu final.
Bien que le calendrier reste pour l’instant inconnu, il est toutefois intéressant de se pencher d’ores et déjà sur le contenu du texte, afin de comprendre les possibles conséquences sur votre activité de location touristique, et plus particulièrement sur la fiscalité de la location meublée de tourisme, nous vous proposons d’étudier ensemble le contenu de la PPL 1176.
La PPL1176, aussi appelée “loi anti-airbnb”, vise principalement les meublés de tourisme, notamment dans les zones tendues.
Il s’agit d’un appartement ou d’une maison loué(e) meublé(e) à une clientèle touristique. Bien que l’on parle souvent de "location saisonnière", seul le terme "meublé de tourisme" apparaît dans les textes législatifs.
Les conditions pour louer un meublé de tourisme sont les suivantes :
En vertu de la nouvelle rédaction du texte, les chambres d’hôtes pourraient être concernées par les changements apportés par la PPL n° 1176, notamment en matière fiscale en voyant leur régime aligné sur celui des locations de longue durée.
Les « gîtes ruraux » peuvent relever soit de la catégorie des chambres d’hôtes, soit de celle des meublés de tourisme (le plus souvent classés), et sont généralement situés hors zone tendue, ce qui implique qu’ils pourront également être concernés par certaines modifications fiscales et réglementaires.
Les changements qui pourraient venir frapper les loueurs de meublés de tourisme si le texte était adopté en l’état se partagent en deux catégories : les nouvelles obligations et les changements fiscaux.
L’article 1-A prévoit que toute location d’un meublé de tourisme, classé ou non, soit soumis à la réalisation d’une déclaration préalable soumise à enregistrement, et ce même s’il s’agit de la résidence principale du loueur, qui devra alors le préciser au moment de la déclaration.
De plus, tous les loueurs en meublé de tourisme devront pouvoir être en mesure de fournir, sur demande de la commune et dans un délai d’un mois, le compte du nombre de jours pendant lesquels le logement meublé a été loué dans l’année civile.
De plus, un article 1-B ajouté lors du passage de la loi du Sénat indique que tout meublé de tourisme faisant l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou d’insalubrité emporte l’interdiction pour son propriétaire de réclamer à ses locataires les sommes dues au titre de la location.
L’article 1 de la PPL 1176 prévoit que les exigences de performances énergétiques applicables aux meublés de tourisme soient les mêmes que celles permettant de définir un logement décent. De plus, dans les communes appliquant cette réglementation, l’obtention d’une autorisation de changement d’usage nécessaire à la mise en location d’un meublé de tourisme, impose aux loueurs de présenter un diagnostic de performance énergétique (DPE) dont le niveau doit être compris entre les classes A et D.
Dans le cas où l’autorisation serait délivrée de manière temporaire, les propriétaires des locaux devront justifier que leur logement respecte les critères de performance énergétique fixés par la loi du 22 août 2021.
À noter : Ces changements ne concernent toutefois que les logements situés en France métropolitaine.
Le calendrier d’application de cette mesure débuterait au 1er janvier 2034, laissant donc 10 ans aux loueurs pour se conformer avec cette nouvelle réglementation, si toutefois elle venait à être définitivement adoptée.
L’article 1 bis prévoit que les communes, sous réserve d’une délibération motivée, pourront abaisser le nombre de jours de location maximum à 90 au lieu des 120 actuels.
L’article 2 prévoit de donner la possibilité aux élus locaux des zones tendues (donc même ceux des communes de moins de 200 000 habitants), la capacité d’imposer un régime de changement d’usage. Cela pourrait limiter la mise en place des locations meublées touristiques (par exemple, une autorisation de changement d’usage serait nécessaire pour louer un meublé de tourisme ou sa résidence principale au-delà de 120 jours par an).
De plus, cette réglementation pourrait être renforcée et instaurer des limites relatives aux zones géographiques concernées, à la construction de logements nouveaux, au nombre d’autorisations délivrées dans une commune, ou à la compensation nécessaire en fonction de chaque territoire. Pour résumer, les communes pourraient recevoir plus de liberté d’action afin d’adapter leur réglementation en fonction de leurs spécificités.
L’article 5 de la loi, apparu lors des discussions du 29 janvier, prévoit que lorsqu’un lot de copropriété a fait l’objet d’une déclaration préalable soumise à enregistrement en vue de sa location comme meublé de tourisme, le propriétaire doit en informer le syndic de copropriété et qu’un point d’information doit alors être inscrit à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale.
Dans la continuité de cet article, le Sénat a ajouté un article 2-Bis dans lequel il est indiqué que « Toute déclaration de changement d’usage […] est soumise au régime d’autorisation préalable fondée sur la présentation d’un procès-verbal de l’assemblée générale mentionnant la décision du vote favorable à la majorité simple des membres copropriétaires ».
Après les changements opérés par la loi de finances 2024, c’est au tour de la PPL 1176 de se pencher sur le régime micro-BIC pour la location de meublés de tourisme.
Pour rappel, après le vote à l’Assemblée nationale, l’article 3 du texte opérait une distinction selon la localisation et l’éventuel classement de chaque bien :
Les sénateurs ont préféré revenir, du moins en partie, sur ce système, jugé trop compliqué à mettre en place, et potentiellement discriminatoire pour certaines communes voisines. En l’état actuel du texte, les chiffres sont les suivants :
Pour mieux vous y retrouver, vous pouvez consulter le tableau comparatif ci-dessous :
|
En zone tendue |
En zone détendue ou montagneuse |
||||
|
Avant LF 2024 |
Après LF 2024 (Actuellement en vigueur) |
PPL n°1176 (Après son vote au Sénat) |
Avant LF 2024 |
Après LF 2024 (Actuellement en vigueur) |
PPL n°1176 (Après son vote au Sénat) |
Meublé de tourisme non classé |
50% (77 700 €) |
30% (15 000 €) |
30% (23 000 €) |
50% (77 700 €) |
30% (15 000 €) |
30% (23 000 €) |
Meublé de tourisme classé |
71% (188 700 €) |
71% (188 700 €) |
50% (77 700 €) |
71% (188 700 €) |
71% (ou 92% sous conditions) (188 700 €) |
50% (77 700 €) |
* Dans le cas où l’ensemble des recettes de location meublée générées sur l’année civile précédente ne dépassent pas 15 000 €.
En somme, les sénateurs reviennent surtout sur la distinction entre les zones tendues et détendues que l’Assemblée nationale avait mise en place, dans la continuité des dispositions de la loi de finances 2024. Ces chiffres pourraient toutefois être amenés à évoluer à nouveau, notamment pour les meublés de tourisme classés, pour lesquels les débats ont montré toute la difficulté pour les sénateurs d’arriver à une solution de compromis.
Une éventuelle prise en compte des amortissements
L’article 4 de la loi, apparu lors des discussions du 29 janvier, prévoit de modifier le régime de la plus-value des particuliers, applicable aux LMNP (Loueurs en Meublé Non Professionnels), pour la vente d’un meublé de tourisme. En l’état, l’article prévoit que si le bien est un meublé de tourisme au moment de la cession, l’ensemble des amortissements déduits depuis l’acquisition seront réintégrés lors du calcul de la plus-value.
Un impact à relativiser
Toutefois, il est important de garder à l’esprit que la plus-value des particuliers fonctionne selon un système d’abattements qui réduisent progressivement le montant de la plus-value au fil des ans. Autrement dit, plus le bien est détenu longtemps, et moins les répercussions de cet article, s’il est adopté, seront visibles pour les propriétaires. Ainsi, au-delà de 22 ans de détention pour l’impôt sur le revenu et de 30 ans pour les prélèvements sociaux, ce nouvel article n’aurait aucun impact financier lors de la revente du bien immobilier.
Mise à jour après le vote par le Sénat : L’article 4 a été supprimé lors du vote au Sénat, en raison d’un manque de visibilité sur les conséquences de son application. L’affaire est donc à suivre pour les prochaines échéances du texte.
Comme nous vous le rappelions en introduction de cet article, rien n’est encore définitif, et cette proposition de loi doit encore passer par plusieurs étapes cruciales, notamment par celle de l’examen au Sénat. Si les loueurs de meublés de tourisme ont tout intérêt à suivre avec attention les prochaines étapes de l’élaboration de cette loi, ceux qui relèvent du régime micro-BIC doivent garder à l’esprit que le temps joue contre eux à quelques mois de la tenue des Jeux Olympiques.
Si certains points de cette loi concernent tous les loueurs de meublés de tourisme, d’autres sont spécifiques à ceux qui relèvent du régime Micro BIC. Or, ce régime a déjà subi une importante réforme lors de l’adoption de la loi de finances 2024, et même si de nombreux propriétaires espèrent de la PPL 1176 qu’elle soit plus clémente que les changements opérés par la loi de finances, rien ne permet de l’affirmer avec certitude. De plus, attendre trop longtemps avant de se poser la question du choix du régime fiscal pour les revenus 2024 pourrait s’avérer être un véritable piège pour les propriétaires, qui doivent impérativement garder à l’esprit que l’option pour le régime réel, le plus avantageux pour les LMNP dans la grande majorité des cas, devra être levée avant mai 2024, à l'aide d'un courrier de levée d'option. Si ce délai est dépassé, ils pourraient subir une augmentation de plus de 40% sur leurs revenus de location saisonnière, de quoi considérer sans plus attendre un passage au régime réel d’imposition.
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Article rédigé par Baptiste BOCHART